Le Billet de la semaine
Bonjour à vous toutes et à vous tous,
Marianne Vic, la nièce et filleule d’Yves Saint Laurent, a publié en 2022 aux éditions du Seuil, un roman sur son oncle, Le Prince de Babylone. Comme l’auteure, née en France en 1965, le précise dans l’épilogue : « Ceci n’est pas une biographie. Ni un regard. » Nous voici prévenus. Pourrait-on alors parler d’un portrait du grand couturier, de sa naissance en Algérie le 1er août 1936, à son décès en France le 1er juin 2008 ?
Tout de suite m’est remontée à la mémoire l’exposition-rétrospective présentée au Musée des beaux-arts de Montréal au printemps 2008. Malade depuis plusieurs mois, Yves Saint Laurent n’avait pu faire le déplacement. Il était représenté par son compagnon Pierre Bergé. Je me souviens très bien de cette conférence de presse le 27 mai à laquelle j’avais eu le privilège d’assister : l’ambiance était pour le moins chargée, et pour cause, car moins d’une semaine plus tard, nous apprenions le décès d’Yves Saint Laurent, emporté par un cancer au cerveau à l’âge de 71 ans.
Le titre fait référence à l’appartement parisien qu’habitait Yves Saint Laurent, au 55, rue de Babylone. Nous assistons, dès les premières pages, aux préparations de la cérémonie d’adieu qui s’est tenue le jeudi 5 juin 2008 à l’église Saint-Roch, rue Saint-Honoré. Pierre Bergé trie sur le volet les 800 invités qui pourront y assister. N’en fait pas partie Karl Lagerfeld.
Ce livre est l’occasion de se remémorer la vie pour le moins tourmentée de celui qui est aussi connu sous l’acronyme d’YSL. Yves Saint Laurent, qui a eu du mal à accepter son homosexualité, était maniaco-dépressif, passionné de son métier, excessif et rigoureux. Il a aussi tenté de se suicider à quelques reprises et a été plusieurs fois en cures de désintoxication.
Lucienne, sa mère, est très belle et plaît aux hommes. Elle a eu trois enfants : Yves en 1936 – sa mère a alors 20 ans et 94 au moment du décès de son fils unique –, Michèle en 1942 et Brigitte en 1945. Nous découvrons, au fil des pages, quelques secrets de famille qui ont eu des conséquences désastreuses sur la vie de plusieurs membres de ce clan.
Marianne Vic revient donc, 14 ans après le décès de son parrain, sur cette histoire familiale hors norme, comme elle l’avait fait dans son précédent ouvrage paru en 2018, Rien de ce qui est humain n’est honteux. Elle décrit la vie tumultueuse et excessive de son oncle, de sa jeunesse à Oran, à son arrivée à Paris à l’âge de 18 ans, les rencontres marquantes dans son parcours personnel et dans sa carrière, jusqu’à sa consécration à son dernier défilé de mode en janvier 2002.
Malgré tout, cet artiste timide, qui avait tant besoin d’être reconnu, a eu des moments heureux comme le jour de son entrée chez Dior le 20 juin 1955 alors qu’il n’a que 19 ans ; sa rencontre avec Pierre Bergé (1930-2017) ; le succès de plusieurs de ses collections, dont la fameuse robe Mondrian – vous verrez comment l’idée lui est venu. Tant que l’inspiration était au rendez-vous pour ce « bourreau de travail », tout allait encore, mais lorsque le souffle créatif s’éteignait, disons que le moral était au plus bas. Épuisé, le couturier le fut, mais veillait sur lui son amie et collaboratrice Anne-Marie Munoz.
Le roman se termine neuf mois après les funérailles d’YSL par la vente aux enchères de 700 lots de sa collection de tableaux, de sculptures et d’objets de toutes sortes, qui a rapporté le pactole de 400 millions d’euros.
J’ai dévoré Le Prince de Babylone, lecture addictive, qui nous rappelle que la gloire et la célébrité sont de courte durée, que l’ascenseur redescend plus vite qu’il ne monte, sans oublier la mémoire, cette faculté qui relaie aux oubliettes, même les plus talentueux. En 2018, Pierre Bergé organise une célébration pour souligner les dix ans de la disparition d’YSL. Triste constat, la majorité des bancs de l’église Saint-Roch sont vides. Où sont-ils tous ? Le show est terminé, on passe à un autre numéro !
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Je vous souhaite de très belles découvertes et à la semaine prochaine,
Marie-Anne