Le Billet de la semaine
Bonjour à vous toutes et à vous tous,
Il y a des livres que l’on veut absolument garder dans sa bibliothèque, car on sait qu’on les relira un jour. Quand tu écouteras cette chanson (Stock, 2022) de Lola Lafon, treizième titre publié dans la très belle collection « Ma nuit au musée », fait maintenant partie de la mienne. Peut-être en sera-t-il de même pour vous…
Qui n’a pas déjà eu en mains Le Journal d’Anne Frank ? Écrit à Amsterdam, aux Pays-Bas, du 12 juin 1942 au 1er août 1944 – les Frank sont arrêtés trois jours plus tard – il a été, à ce jour, vendu à plus de 30 millions d’exemplaires.
L’Annexe est ce lieu minuscule où la famille s’est terrée durant 25 mois : le père, Otto Frank, juif allemand, directeur d’une petite entreprise de pectine – le seul de la famille qui survivra à Auschwitz-Birkenau –, Edith, sa femme, la mère de Margot et d’Anne (morte à l’âge de 15 ans en 1945).
Le Journal d’Anne Frank nous apprenait, entre autres, à travers leur quotidien, qui avait aidé clandestinement durant 760 jours les huit occupants de l’Annexe. Lola Lafon, avec son récit touchant, complète certaines informations, le tout entremêlé de pans de sa vie personnelle et familiale.
« C’est elle, Ida Goldman [la grand-mère maternelle de Lola], la raison de ma nuit dans l’Annexe ; elle qui m’a offert, j’avais une dizaine d’années, une médaille dorée frappée du portrait d’Anne Frank », tandis que c’est Ronald Leopold, directeur du Musée Anne-Frank, qui lui donné la permission, le 18 août 2021, en pleine pandémie, de passer dix heures dans l’Annexe.
Lola Lafon, née le 28 janvier 1974, arrive à Paris alors qu’elle a à peine 12 ans : « J’avais grandi en Bulgarie et en Roumanie [celle de Ceaușescu], ces pays dans lesquels j’avais tant aimé fêter la Pâque orthodoxe. Mes grands-parents étaient polonais, russes, mais aussi français du Sud-Ouest du côté de mon père, je passais mes vacances dans les Landes, une partie de ma famille était nord-américaine, j’étais trilingue. »
Pour se préparer à cette nuit, Lola Lafon a, en amont, discuté avec des gens exceptionnels qui ont connu les Frank, dont Laureen Nussbaum, une voisine de la famille, qui « étudie le Journal en tant qu’œuvre littéraire depuis les années 90 » ou encore Teresien da Silva qui, depuis 37 ans, travaille au musée et qui « a rencontré plus de 90 témoins, amis, voisins ou parents des Frank ». Derrière l’horreur et la barbarie, il y a aussi eu, parfois, de la générosité et de l’entraide.
Si le manuscrit a été récupéré par madame Miep Gies, secrétaire au service d’Otto Frank et qui les a aidés à survivre dans leur cache, celui de sa grande sœur Margot (morte à l’âge de 19 ans en 1945, au camp de concentration de Bergen-Belsen), n’a jamais été retrouvé. On y apprend que la première espérait prendre la plume comme journaliste et/ou écrivaine, tandis que Margot « rêvait de devenir infirmière ou sage-femme en Palestine, après la guerre ».
Le Journal d’Anne Frank a été publié quelques années après la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Un témoignage inestimable, mais dont le traitement pour la publication soulève quand même quelques questions : Qui a décidé de ce que l’on gardait ou retranchait ? Les éditeurs néerlandais, allemands ou américains ont chacun eu des exigences de censure à des degrés divers. A-t-on obtempéré à leurs demandes ? Est-ce qu’Otto Frank a, comme on l’a souvent laissé sous-entendre, retiré certaines pages ? Le milieu artistique, que ce soit le cinéma, le théâtre, la comédie musicale, s’est « s’emparé » de l’histoire d’Anne Frank. A-t-il été respectueux de l’œuvre ou a-t-elle été dénaturée ?
« Quand l’arbre généalogique a été arraché, la naissance d’un enfant revêt une importance particulière : le nouveau-né devient une preuve de survie. Il ne pourra se contenter d’exister. Il héritera d’un devoir : celui de vivre plus fort, pour et à la place des disparus. » (p. 167)
En cette ère où le négationnisme reprend du poil de la bête, il est d’autant plus essentiel de lire Quand tu écouteras cette chanson.
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Je vous souhaite de très belles découvertes et à la semaine prochaine,
Marie-Anne