Bonjour à vous toutes et à vous tous,

Après ma lecture de Nickel Boys en 2020, j’attendais avec beaucoup d’impatience (je ne suis certainement pas la seule !) le prochain Colson Whitehead. Malheureusement, Harlem Shuffle (Albin Michel, 2021, 2023) n’a suscité chez moi aucune émotion, ce qui fut loin d’être le cas de son précédent roman. Pourquoi ?
J’ai quelques bémols à commencer par la traduction de Charles Recoursé parfois inappropriée, trop franchouillarde (« naze », « j’ai la dalle », « le casse », etc.) qui m’ont fait décrocher à plusieurs occasions. Le texte comporte également des longueurs et, pour une rare fois, je me suis mise à rêver à une série télévisuelle en plusieurs épisodes.
Ce qui m’a plutôt laissée indifférente, c’est l’histoire des truands, dealers, braqueurs, escrocs, proxénètes… qu’il s’agisse de Miami Joe, Pepper, Chink Montague, Arthur, Thomas Andrew Bruce, alias Cheap Brucie, sans oublier les Blancs qui se croient tout permis et les policiers à qui il faut graisser la patte pour obtenir une forme de protection, laquelle, dans les faits, est simplement de fermer l’œil sur leurs trafics illicites.
Ceci étant dit, il y a aussi du bon dans ce roman de 420 pages. Les descriptions du Harlem du début des années 60 sont si précises qu’on a l’impression d’y être. Pensons à certaines scènes qui se déroulent à l’Hôtel Theresa, alors surnommé le « Waldorf Astoria » de Harlem, ou au club privé afro-américain le Dumas Club.
On suit donc durant quatre ans, de 1959 à 1964, Raymond « Ray » Carney, orphelin de mère, décédée en 1942 des suites d’une pneumonie, et son père, un magouilleur de premier ordre, peu présent pour son fils. Après des études de commerce à Queens College et quelques boulots par ci par là, Ray est devenu propriétaire du Carney’s Furniture, situé au coin de la 125e et de Morningside. Le loyer n’est pas trop cher, le commerce est bien situé, mais disons que les accessoires d’intérieur (meubles, sofas, téléviseurs…) en vente ne sont pas toujours achetés de manière légale, refilés en grand nombre par Frederick (Freddie) Dupree, le cousin de Ray de qui il est très proche, mais qui a une mauvaise influence sur lui.
Elizabeth Jones, la femme de Ray et la mère de ses deux jeunes enfants, May et John, travaille de son côté dans une agence de voyages, la Black Star Travel. Ses parents, Alma et Leland Jones, n’ont pas beaucoup d’estime pour leur gendre qui ne vient pas du même milieu qu’eux, le père étant « l’un des plus éminents comptables du Harlem noir, qui arrange les bilans des meilleurs médecins, avocats, politiciens et grands commerçants de couleur de la 125e Rue. »
Harlem Shuffle est le premier tome d’une trilogie qui embrasse autant les thèmes de la famille, qu’elle met en avant-plan les tensions raciales, les guerres entre gangs, etc. Je dois avouer que ma décision n’est pas encore prise à savoir si je vais poursuivre dans cet univers où la ségrégation est omniprésente et où le quotidien est un combat de tous les instants…

Je ne sais pas qui a eu l’idée du titre de la première exposition présentée cette année au Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM), Parall(elles) : une autre histoire du design, mais je le trouve intéressant et prometteur pour le reste de la saison qui sera sous le signe des femmes.
Avant même d’accéder aux cinq salles, une Corvette Fancy Free de 1958 conçue par Ruth Glennie pour General Motors, nous attend au bas du majestueux escalier du pavillon Michal et Renata Hornstein de la rue Sherbrooke. Puis en montant les marches, on aperçoit Ducere (2022), une mosaïque de l’artiste américaine Molly Hatch, créée expressément pour le MBAM, composée de 198 assiettes en faïence émaillée, chacune peinte à la main sous couverte.
En parcourant l’exposition, j’ai réalisé combien, au fil des siècles, les méthodes de design se sont transformées et adaptées à leur époque. Il n’est plus seulement question du design industriel, on ratisse beaucoup plus large et l’exposition le démontre fort bien.
Cette histoire « parallèle » est donc celle du design et des femmes que l’on découvre de manière chronologique à travers les œuvres et les objets d’artistes canadiennes et américaines du milieu du XIXe siècle à nos jours :
1. Les femmes et le mouvement Arts and Crafts
2. L’entre-deux-guerres : nouvelles attitudes et perspectives
3. Le boom de l’après-guerre : du design industriel à l’artisanat
4. Féminismes, postmodernisme et pluralisme
5. Le design à l’aube du XXIe siècle.
Si le commissariat a été confié à Jennifer Laurent, conservatrice des arts décoratifs et du design au MBAM, sous la direction de Mary-Dailey Desmarais, conservatrice en chef du MBAM, la scénographie, stylisée et en parfaite harmonie avec son sujet, est signée par Odile Gamache (dont le nom est plus souvent associé au théâtre qu’au musée), en collaboration avec Aïcha Chaouachi, chargée de projets – Scénograhie, MBAM.
Si je peux me permettre, portez une attention particulière à la couleur des murs (j’adore !) et levez à l’occasion les yeux, car même l’éclairage est design.
Petit recul dans le temps : en 2000, la collection du Musée des arts décoratifs intègre celle du MBAM. Sur les quelque 250 objets et œuvres que l’on peut admirer lors de notre visite, 82 appartiennent au MBAM, tandis que les autres proviennent soit de collections privées ou de musées canadiens et américains.
Volontairement, je ne donnerai aucun nom d’artistes, car il faudrait toutes les nommer, par contre vous verrez autant d’accessoires de mobilier (chaises, bureaux, coffres, lampes de table, chandeliers) que de vêtements (robes, chapeaux, cravates, chaussures), de bijoux (colliers, broches, bagues, bracelets) que d’articles culinaires (services à thé et à café, bols, bouteilles), le tout confectionné dans divers matériaux : céramique, laine, lin, verre, faïence émaillée, grès, porcelaine, cuivre, bronze… sans oublier quelques vidéos. Comme vous pouvez le constater, il y en a vraiment pour tous les goûts !
Vous avez donc jusqu’au 28 mai prochain pour découvrir ou redécouvrir des joyaux de « notre » collection, l’une des plus impressionnantes en Amérique du Nord.
Je laisse les mots de la fin à Stéphane Aquin, directeur général du MBAM : « L’exposition Parall(elles) s’inscrit dans la démarche entamée par le musée pour redonner aux femmes artistes et designers – dont la contribution remarquable a été négligée, voire ignorée pendant trop longtemps – la place fondamentale qui leur revient. » Belle initiative qui, je l’espère, va se poursuivre dans les prochaines années !
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Je vous souhaite de très belles découvertes et à la semaine prochaine,

Marie-Anne