Kinutani, Yu

Ghost in the Shell est une histoire policière avec beaucoup de drames humains se déroulant dans un environnement post-cyberpunk. Habituellement, un anime est basé sur un manga, mais exceptionnellement, dans ce cas-ci, c’est le contraire : la série télévisée animée est venue en premier (en 2002-2005) et ce manga est une adaptation très fidèle d’une sélection de cinq épisodes (sur les cinquante-deux de la série télévisée).
Le manga seinen de Ghost in the Shell : Stand Alone Complex a d’abord été publié en série dans Weekly Young Magazine (décembre 2009-mars 2010) puis dans Gekkan [mensuel] Young Magazine (avril 2010-décembre 2012) avant d’être compilé en cinq volumes chez Kodansha. Il a été traduit en anglais chez Kodansha Comics (2011-2014) et en français chez Glénat (2013-2014).
J’aime bien Ghost in the Shell en général parce que c’est une excellente histoire cyberpunk : les gens peuvent obtenir des cyber-améliorations, l’Internet (le « réseau ») est partout et peut être utilisé de manière inimaginable. L’histoire a également de forts aspects sociaux et politiques, car elle donne un aperçu d’un avenir techno-dystopique fascinant (ce qui semble populaire au Japon). Dans ce contexte, le « ghost » [fantôme] se réfère à l’aspect de l’esprit qui le rend unique et conscient de soi (l’âme), même lorsqu’il est numérisé et téléchargé sur un cyber-cerveau ou sur le Net, la « shell » [coquille] est le corps (biologique ou cybernétique) et les « standalones » [autonomes] sont ceux qui « restent en dehors du système » (les non cyber-améliorés).
Cependant, je préfère la série Stand Alone Complex (SAC) (à la fois l’anime et le manga) parce que je pense qu’elle offre de meilleurs designs (principalement pour les personnages) et une narration plus solide (le format de série télé est plus propice au développement des personnages et du scénario). Les deux films d’animation (réalisés par Mamoru Oshii) étaient géniaux mais vraiment trop philosophiques. En contournant l’arc narratif du « maître des marionnettes », SAC est en mesure de nous en dire plus sur le personnage principal, le major Motoko Kusanagi, et de développer son histoire de manière plus intéressante.
De même, le manga original de Masamune Shirow est superbe, mais le dessin est trop détaillé et l’histoire trop complexe pour être facilement appréciée. L’art de Shirow manque également de cohérence, ayant l’air parfois très sérieux et parfois (pour être humoristique) assez caricatural. Avec ce nouveau manga de Yu Kinutani, l’art est plus propre, plus sérieux et plus stable tout en étant suffisamment développé. C’est donc beaucoup plus agréable visuellement. La narration et la mise en page suivent de près la série télévisée (ajoutant souvent même plus de scènes pour rendre l’action plus facile à suivre dans un médium statique), ce qui donne presque l’impression d’un « story-board ».
Chaque volume du manga est l’adaptation d’un épisode de la série animée. Le premier raconte l’histoire de l’épisode 1 « Section 9 », le vol. 2 couvre l’épisode 2 « Testation », le vol. 3 raconte l’épisode 7 « Idolater », le vol. 4 concerne l’épisode 14 « ¥ € $ » et le vol. 5 nous présente l’épisode 13 « Pas égal ». Les volumes 1 et 4 comprennent également trois histoires courtes bonus du manga Tachikoma Days de Masayuki Yamamoto. Ce sont des épisodes amusants impliquant les blindés arachnoïdes (« think tanks ») dotés d’intelligence artificielle appelés Tachikoma – faisant ainsi écho aux capsules vidéo à la fin des épisodes de la série télévisée.
Un aspect agaçant de Ghost in the Shell (principalement pour les féministes et les personnes qui ne connaissent pas la série) est la façon dont le major s’habille : de manière très provocante et sexy. Cela fait bien sûr partie du « fan service » (pour plaire et alimenter les fantasmes des fans), mais le personnage a également une bonne raison de le faire. Un corps entièrement cybernétique (même s’il a une forme féminine généreuse) a une apparence un peu froide et asexuée et, donc, le major porte des vêtements très séduisants pour revendiquer et exprimer sa féminité. J’imagine qu’elle pourrait penser quelque chose comme « avec un corps comme celui-ci, c’est mieux de le montrer » ou peut-être, se sentant un peu comme une poupée, elle veut s’habiller comme telle. Cela offre aussi un élément de surprise : personne ne s’attend à ce que quelqu’un qui s’habille comme cela soit aussi forte et agressive !
Finalement, ma plus grande déception à propos de ce manga est qu’il ne comporte que cinq volumes. Je suppose qu’il aurait fallu trop de travail et de temps pour adapter les cinquante-deux épisodes de la série télévisée. C’est vraiment dommage ! Cependant, si vous en voulez plus, il vous reste toujours la série télévisée – qui a également été complétée par trois romans (disponibles chez Dark Horse), deux OVAS (Original Video Animation) (The Laughing Man, Individual Eleven) et un film (GITS : SAC – Solid State Society)…
Je suis déjà un grand fan de Ghost in the Shell et d’histoires cyberpunk en général, mais j’aime particulièrement cette série de mangas, car elle propose des designs et des dessins puissants, une excellente narration et constitue une lecture facile (ce qui est un baume comparé au manga original). C’est assez agréable à lire si vous aimez les histoires d’investigation avec beaucoup d’action (parfois assez violente), des thèmes socio-politiques riches et qui se déroulent dans un futur cyberpunk.
Je dois avouer que cela fait longtemps que je n’ai pas pris autant de plaisir à lire un manga. Je le recommande fortement !
Titre original : Stand Alone Complex / Koukaku Kidoutai S.A.C. / lit. « Police anti-émeute blindée mobile SAC »
Pour lectorat adolescent (13+).
Membre : Claude J, Villeray-Saint-Michel-Parc-Extension
Kinutani, Yu. Ghost in the Shell : Stand Alone Complex, vol. 1 à 5, Éditions Kodansha Comics, 2016, 288 pages.