Slimani, Leila

Dans ce deuxième tome, la terre d’Amine devient enfin fertile. Il est maintenant prospère et s’intègre à la bourgeoisie. « Il dirige son entreprise d’une main de fer » et persiste dans une attitude patriarcale face à sa femme Mathilde qui continue de gérer la maisonnée et de recevoir les démunis, les indigènes dans un « dispensaire » qu’elle a improvisé. Malgré tout, elle se sent délaissée.

Néanmoins, Amine délègue à sa femme la gestion de la comptabilité. Elle a trouvé un truc pour acquérir « une certaine indépendance » : elle arrondit les chiffres et cache de l’argent.

Au début du roman, c’est la construction de la piscine, « un des signes de prospérité ». Mathilde se dit qu’enfin il réalise son désir, mais Amine fait construire cette piscine en pensant à faire honneur à sa fille Aicha qui reviendra bientôt de la France après avoir étudié quatre ans la médecine. Voici la réussite de Mathilde : Amine qui a accepté que sa fille parte seule faire des études supérieures dans un pays occidental. On assistera aussi à la plus grande réussite commune du couple, mais je n’en dis pas plus. Il y a plein d’autres sujets qu’on pourrait relever : le comportement d’Amine face à sa soeur Selma, son fils Selim…

Il faut préciser que sur le plan politique c’est le roi Hassan II qui est au pouvoir et Amine entend des rumeurs que le roi réfléchit au transfert des terres de certains riches au profit des paysans ; cela préoccupe Amine à un point tel qu’il a recommencé à faire de l’insomnie…

Le tome 3 pourra sûrement nous éclairer et nous découvrirons alors si les craintes d’Amine étaient fondées.

Une belle écriture, dynamique, facile à suivre, une description précise de tous les personnages. Nous sommes témoins des stigmas, des tabous sur la femme et les classes sociales.

La domination de l’homme face à la femme et aux paysans : rigidité, sévérité, fermeté. On retrouve plusieurs thèmes : pauvreté, richesse, sexualité, amour, éducation, travail, etc.

Contrairement à d’autres critiques, nous n’assistons pas encore à la naissance du féminisme. Une lecture riche et très intéressante !

Membre : Lucie, Verdun

Slimani, Leïla. Le Pays des autres. 2, Regardez-nous danser, Éditions Gallimard, collection Blanche, 2022, 368 pages.

Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.

Bouysse, Franck

Franck Bouysse, l’auteur de Né d’aucune femme (2018), nous entraîne au cœur de la légende du Gour Noir, où vit une famille tissée serrée.

Cependant, Joyce est le grand manitou et tyran du bourg, propriétaire de tout : centrale, carrières et barrage. Tous les paysans doivent travailler pour lui. La vie est pénible.

Bouysse a l’art de décrire la situation avec bienveillance dans une atmosphère poétique, campagnarde où règne une grande simplicité.

L’auteur possède une langue somptueuse qui rend la lecture agréable.

Abonnée : bibliothèque Germaine-Guèvremont

Bouysse, Franck. Buveurs de vent, Éditions Albin Michel, 2020, 280 pages.

Slimani, Leïla

Je n’entrerai pas dans les détails, mais, en bref, ce premier tome raconte l’histoire de la rencontre, après la Libération, de Mathilde, jeune Alsacienne, et d’Amine, Marocain, ancien combattant. Ils tombent en amour, se marient et s’installent dans la campagne près de Meknès.

Il a hérité de la terre de son père, une terre aride ; le couple en arrache à tous points de vue. Nous sommes à l’époque du patriarcat pur et dur, on assiste à la confrontation des valeurs différentes, à la violence conjugale mais, malgré tout, ils demeurent ensemble.

Membre : Lucie, Verdun

Slimani, Leïla. Le Pays des autres. 1, La guerre, la guerre, la guerre, Éditions Gallimard, 2020, 367 pages.

Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.

Rosnay, Tatiana de

Voilà la destinée de deux femmes. Le hasard les réunit. Candide Louradour vient au secours de Dominique Marquisan à la suite d’un accident. Une amitié intense se développe entre les deux femmes.

Ce roman trace le chemin fragile vers l’acceptation de soi et la liberté intérieure.

Une auteure à découvrir. Bonne lecture !

Abonnée : bibliothèque Germaine-Guèvremont

Rosnay, Tatiana de. Nous irons mieux demain, Éditions Robert Laffont, 2022, 355 pages.

Lemaitre, Pierre

L’histoire tourne autour de la famille Pelletier : Louis, le père, Angèle, la mère, Jean dit Bouboule, fils aîné, suivi de François, Hélène et Étienne.

Dans ce récit mouvementé, l’auteur aborde le retour du passé, des passions, des meurtres, des non-dits, le tout baignant dans un parfum d’exotisme.

Totalement jouissif et un grand roman d’aventures. J’ai été captivée par tous les événements vécus par cette famille.

Le Grand Monde : les années glorieuses est le premier tome d’une tétralogie.

Membre : CestDoris

Lemaitre, Pierre. Les Années glorieuses : Le Grand Monde, Éditions Calmann-Lévy, 2022, 487 pages.

Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.

Bonjour à vous toutes et à vous tous,

L’eau du lac n’est jamais douce / L’acqua del lago non è mai dolce de Giulia Caminito (Gallmeister, 2021, 2022) est dans la même lignée que les romans de ces écrivaines italiennes : Elena Ferrante, Viola Ardone, Rosa Ventrella et Silvia Avallone.

En fin de volume, l’autrice, née à Rome en 1988, précise : « Ce roman n’est pas une biographie, ni une autobiographie, ni une autofiction, c’est une histoire qui a avalé les fragments de nombreuses vies pour essayer de les transformer en narration, en récit des années où j’ai grandi, des chagrins que j’ai seulement côtoyés et de ceux que j’ai traversés. »

Ainsi, durant une dizaine d’années, nous suivons Gaia, la narratrice qui a 11 ans au moment où débute l’histoire. Sa rouquine de mère, Antonia Colombo, travaille comme femme de ménage. C’est elle « l’homme » de la maison. La famille de quatre enfants (Mariano, Gaia, les jumeaux, Maicol et Roberto), habite dans un logement humide d’à peine 20 mètres carrés situé au sous-sol du 63 via Monterotto, un quartier populaire de Rome « peuplé d’héroïnomanes et de vieillards moribonds ».

Quand Antonia veut quelque chose, elle l’obtient à force de persuasion. Rien ne l’arrête. Elle répète à qui veut l’entendre : « Il faut insister tant qu’on n’a pas obtenu ce qu’on veut, si on insiste sans relâche, rien ne résiste. »

Elle est le pilier de ce clan atypique composé de Massimo, son mari, qui est invalide depuis qu’il est tombé d’un échafaudage. Il n’a rien pu réclamer aux assurances puisqu’il était payé au noir. Depuis cet accident, alors qu’il n’avait pas encore 40 ans, il ne peut se déplacer qu’en fauteuil roulante.

À l’âge de 17 ans, Antonia s’était retrouvée enceinte d’un homme qui est encore derrière les barreaux pour avoir commis un homicide. De cette courte relation est né, il y a 15 ans, Mariano, l’anarchiste de la smala, le demi-frère de Gaia et des jumeaux.

Ce qui compte avant tout pour Antonia, c’est la justice. « Si nous crions dans la maison elle ne prépare pas de dîner, si nous préférons jouer plutôt que l’aider à s’occuper des jumeaux, elle ne nous donne pas de goûter pour l’école ou elle confisque nos trousses ; elle est faite pour les grèves et les démonstrations de résistance. » (p. 21)

Si l’appartement est dépourvu de télévision, la radio occupe une place de choix ainsi que les livres empruntés à la bibliothèque. Antonia se bat depuis des années pour avoir un logis plus grand, mais sans succès. Puis, revirement de situation avec l’arrivée d’une nouvelle cheffe de service. Enfin, la famille déménage à Anguillara Sabazia. Que va-t-il se passer à partir de maintenant ? De quoi seront faits leurs lendemains ? L’espoir est-il permis ?

L’adolescence de Gaia ne sera pas de tout repos : les amitiés seront parfois trahies, les amours insatisfaisantes, les sorties permises au compte-gouttes. Réussira-t-elle dans ses études ? Ira-t-elle à l’université comme le souhaite sa mère, déjà tellement déçue par l’attitude de son fils aîné et impuissante devant un mari handicapé ?

Malgré quelques longueurs, j’ai aimé cette histoire dans laquelle, grâce à sa force de caractère, la mère fait tout ce qu’elle peut pour se sortir de la misère et offrir un meilleur avenir à sa progéniture…

Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.

Les Irrésistibles de Marie-Anne ont aussi leur page Facebook. Venez voir !

https://www.facebook.com/LesIrresistiblesDeMarieAnne

En vous rendant sur la chaîne YouTube à l’émission Les Irrésistibles de Marie-Anne, vous pourrez entendre, à chaque semaine, mes commentaires et critiques de théâtre ou d’arts visuels.

Je vous souhaite de très belles découvertes et à la semaine prochaine,

Marie-Anne

Tuil, Karine

Un excellent roman. Qui porte une charge émotionnelle très forte. Les phrases sont assenées, comme écrites sous une tension constante. La justesse et la précision des observations psychologiques, la vraisemblance des situations produisent un tel effet de réalité que j’ai senti au début le besoin de vérifier quelques noms dans Google pour m’assurer que j’étais bien dans une fiction.

Karine Tuil nous montre des personnages en proie à un chaos intérieur et qui tentent d’y répondre, de reprendre le contrôle de leur vie, de lui redonner un sens. À cet égard, le vécu de la narratrice, juge d’instruction antiterroriste, se rapproche de celui du jeune Abdeljalil, enfant violenté, laissé à lui-même, qui redonne un sens à sa vie à travers l’endoctrinement par l’État islamique.

Membre : S. de Montréal

Tuil, Karine. La Décision, Éditions Gallimard, 2022, 296 pages.

Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.

Follett, Ken

L’écrivain britannique Ken Follett est célèbre notamment pour son imposant ouvrage Les Piliers de la terre (plus de 1000 pages !), récit de la construction d’une cathédrale médiévale fictive, livre plusieurs fois recensé par les membres du Club des Irrésistibles. Pour cette rédaction, l’auteur s’était abondamment documenté, de telle sorte que les médias le consultent souvent quand il est question de cathédrales !

Le 15 avril 2019, Follett fut donc contacté quelques minutes à peine après le début de l’incendie qui ravagea ce jour-là Notre-Dame de Paris. Il était encore sous le choc, car on craignait une perte totale de la cathédrale, ce qui put être évité in extremis comme on sait. Peu après, son éditrice française lui demanda d’écrire un texte exprimant son amour pour Notre-Dame, ce qu’il accepta et qu’il fit sous le coup de l’émotion, entre le 19 et le 30 avril 2019 ; tous les profits et les droits d’auteur devant être versés au fonds de reconstruction.

Le livre ne traite cependant pas de l’incendie ni du projet de reconstruction annoncé par le président Macron. L’objectif de l’auteur est de rappeler que l’édification d’un édifice, aussi gigantesque qu’une cathédrale, était au Moyen-âge un projet de toute la société, clergé, aristocratie, entrepreneurs, ouvriers et fidèles.

Ce n’est donc pas une histoire exhaustive de la cathédrale. Il la résume plutôt en cinq dates.
1163 : lancement du projet ;
1831 : publication du livre éponyme de Victor Hugo, après les destructions de la période révolutionnaire ;
1841 : début de la reconstruction par l’architecte Eugène Viollet-le-Duc ;
1944 : entrée du général De Gaule dans la cathédrale, à la libération de Paris ;
1989 : publication du roman Les Piliers de la Terre.

Ken Follett ne le dit pas, mais on peut déduire qu’il n’imagine pas que la société puisse encore se passionner pour un projet collectif grandiose, tout au moins en Occident. En effet !

Membre : Pierre, abonné de la bibliothèque Germaine-Guèvremont

Follett, Ken. Notre-Dame, Éditions Robert Laffont, 2019, 73 pages.

Mas, Victoria

Ce roman se déroule essentiellement sur l’île de Batz, au large de Roscoff. Victoria Mas retranscrit brillamment l’atmosphère qui règne sur l’île, son côté sauvage et merveilleux, mais également son aspect rigoureux et inhospitalier.

Sœur Anne, après avoir été maltraitée par son père, s’est réfugiée au couvent dès l’âge de treize ans. Désormais adulte, elle fait le choix de quitter la maison mère des Filles de la Charité à Paris dans l’espoir de voir la Sainte Vierge lui apparaître en Bretagne.

À Batz, elle va rencontrer Michel Bourdier, le père autoritaire de Hugo, un adolescent rêveur, et de Julia, une petite fille asthmatique. Hugo va se lier d’amitié avec Isaac qui a perdu sa mère il y a dix ans dans un accident de voiture. Isaac est différent des autres jeunes de son âge et subit souvent des violences verbales ou physiques.

Tout semble immuable sur ce territoire jusqu’à ce qu’Isaac voit une apparition sur un promontoire. Cette vision va changer le cours de l’existence de tous les personnages et plus largement de la population de l’île. « Rien ne menace plus l’homme que les visites du Ciel. »

Un roman passionnant et intemporel qui interroge sur les questions de la vanité, de la croyance et du sacré.

Membre : France

Cette suggestion est proposée par un lecteur du Pays de Romans – France, membre du club de lecture Troquez vos Irrésistibles et partenaire du Club Les Irrésistibles des Bibliothèques de Montréal.

Mas, Victoria. Un miracle, Éditions Albin Michel, 2022, 224 pages.

Giraud, Brigitte

L’amorce de la lecture d’un nouveau livre est toujours précédée d’informations, impressions, attentes influençant a priori la satisfaction éprouvée à l’égard des premières pages, des premiers chapitres : l’auteur (autrice) que je connais déjà ou pas, ce que j’ai entendu ou lu sur le livre, ses couvertures, les informations qu’on a choisi de nous donner pour nous convaincre de le lire (un des meilleurs écrivains de sa génération) et, bien sûr, les raisons variables et pas toujours rationnelles sous-jacentes au choix du livre retenu : essai, roman, reçu en cadeau, encensé par la critique, faut l’avoir lu absolument au cours de notre vie, s’est mérité un prix très convoité, etc. Il en est assurément ainsi pour tout le monde.

J’amorce donc Vivre vite de Brigitte Giraud, alimenté que je suis par le fleuve gonflé de notoriété du Goncourt qui impose une certaine pression à aller voir, même si la moyenne au bâton des Goncourt, pour moi, ne dépasse probablement pas les 50% de succès. Je dois d’emblée avouer que je craignais d’être déçu en raison de la trame basée sur le dépouillement par l’autrice de toutes les causes ayant pu aboutir à l’intolérable conclusion funeste. Je ne décrirai pas ici en détail le contenu. Plusieurs l’ont fait et très bien avant moi.

L’autrice (ne la connais pas) a perdu son mari il y a vingt-trois ans lors d’un accident de moto (c’est tragique, ce sera une lecture à coup sûr poignante) et nous sommes conviés à découvrir chacun des événements et des décisions ayant formé la chaîne menant à l’accident. Si, on le comprend assez rapidement, un seul des maillons de cette chaîne s’était détaché avant le moment fatidique (par exemple s’il avait plu cette journée-là) l’accident aurait été évité. Et Vivre vite n’aurait pas été écrit. Tous ces « si » sont connus dès le début du livre, un chapitre pour chacun des vingt-trois d’entre eux.

J’avais donc, disais-je, un pressentiment dès le début. Nous connaissons tous l’effet papillon, un battement d’aile peut entraîner une série d’événements menant à une tempête. L’image est universelle. Mais ici la fin est connue ! Ce n’est pas un roman. C’est effectivement tragique, triste et on ne peut humainement qu’être touché. Mais, dans mon cas, plus par empathie pour l’autrice que par le livre où je me sentais reprendre le même refrain à chaque chapitre. Ceci dit, ce n’est pas une lecture regrettée. On visite le Lyon d’il y a vingt ans, la vie sans cellulaire, la musique de l’époque, les aspirations sociales, mais ça demeurait trop linéaire pour moi. Il y manque cette autre dimension littéraire qui nous happe, nous interpelle et nous pousse à anticiper la suite, la finalité, le sens associé au livre.

Bon, bref, je n’ai pas détesté loin de là. Qui peut rester insensible à un tel récit ? Quant à sa consécration par le Goncourt il y a longtemps que j’ai lancé la serviette de comprendre ou de deviner ce qui lui est méritoire. L’an dernier, c’était un labyrinthe littéraire de près de 500 pages (La Plus secrète mémoire des hommes de Mohamed Mbougar Sarr) et il y a deux ans, un polar paranormal (L’Anomalie d’Hervé Le Tellier). Cette année un récit qui m’a rappelé à plusieurs occasions combien la consécration d’Annie Ernaux par le prix Nobel était plus que méritée.

Membre : Daniel de Repentigny

Giraud, Brigitte. Vivre vite, Éditions Flammarion, 2022, 206 pages.

Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.

Vigan, Delphine de

Dès 2001, Mélanie est attirée par les téléréalités genre Loft Story. Elle a déjà été participante et est, depuis, devenue une accro de la caméra. Plus tard, femme mariée et mère de deux enfants, elle devient une célèbre youtubeuse avec son fils Sammy et sa fille Kimmy Diore, principaux acteurs des vidéos en ligne qui lui rapportent beaucoup d’argent. Son mari est le manager de cette nouvelle industrie numérique.

À l’âge de six ans, Kimmy est enlevée ; ce drame familial amènera un voile sombre sur le succès virtuel de la youtubeuse. Cet enlèvement sera résolu de façon inattendue.

Puis Delphine de Vigan nous transporte en 2031. Sammy, dans la jeune vingtaine, a coupé les liens avec sa mère et connaît des problèmes de phobie sociale aigue et de paranoïa qui requiert les services d’un psychiatre. Kimmy, quant à elle, tient à revisiter tous les rapports et documents inscrits à son sujet lors de son enlèvement qui a changé sa vie.

adoré cette lecture tout à fait moderne et crédible à plusieurs niveaux qui nous amène à une réflexion plus réaliste des réseaux sociaux.

Membre : Josette G. de Montréal

Vigan, Delphine de. Les enfants sont rois, Éditions Gallimard, 2021, 348 pages.

Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.

Giebel, Karine

Léo entend dans sa tête les insultes qui fusent et les surnoms que ses tortionnaires lui envoient : Léo le triso, le bâtard. Il se les attribue : je suis un imbécile, un crétin.

Un jour, il dit à sa mère : je veux mourir. Il rêve parfois d’être ailleurs, d’être à Glen Affric, une vallée d’Écosse, d’où son frère lui a envoyé une carte postale qu’il garde précieusement. Mais son grand frère est en prison pour un meurtre qu’il clame n’avoir jamais commis.

Ce roman parle d’injustice, mais aussi de fraternité, d’amitié, d’amour. En parallèle, on apprend l’existence d’une jeune femme retenue en otage par un monstre.

Une lecture haletante dont le propos est excessivement dur. Des destins qui nous habitent longtemps.

Membre : Laval-Vimont

Giebel, Karine. Glen Affric, Éditions Plon, 2021, 2022, 768 pages.

Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.

Giulia, Caminito

Une relation mère-fille intense. Gaia est dominée par sa mère, Antonia Colombo qui se relève par tous les moyens, à la force du poignet. Elle élève seule ses quatre enfants, car son mari à la suite d’un accident de travail a perdu l’usage de ses jambes.

La pauvreté fait donc partie de sa vie, mais elle se bat. Gaia sentira de la frustration, de la colère contre la vie, mais aussi de l’admiration pour sa mère. Un long plaidoyer concentré sur la vie de Gaia par Gaia.

Titre original : L’acqua del lago non è mai dolce

Membre : Laval-Vimont

Giulia, Caminito. L’eau du lac n’est jamais douce, Éditions Gallmeister, 2021, 2022, 349 pages.

Salvayre, Lydie

Durant les 247 pages agréables à lire, Lydie Salvayre adresse une lettre à Miguel de Cervantes Saavedra. Elle désire partager une réflexion concernant son Don Quichotte. De sa motivation première pour sortir de son quotidien et partir à l’aventure ; des combats imaginaires ou réels que Don Quichotte a choisis ; de sa relation avec les femmes de toutes provenances.

Un homme malade se réfugie dans un petit village. Son quotidien se résume à la marche en forêt et sa visite à un centre médical afin de recevoir des traitements. Pour les gens du village, cet étranger suscite une réaction positive. D’autres, sont peu enclins à l’acceptation. Un groupe d’hommes (Émile, Dédé, Marcelin et Gérard) discutent au quotidien dans un café ; ils échangent concernant la politique, le vent, l’immigration.

Voici un extrait de la quatrième de couverture : « Des hommes retournent sur d’autres la brutalité d’un ordre dont ils souffrent. Ils s’inventent à peu de frais de commodes ennemis. Certaines frayeurs en eux les agissent. » La narration nous amène soit vers les discussions entre ces comparses, soit vers les pensées de cet homme malade, arrivé depuis peu dans ce village.

Afin de bien situer l’atmosphère du café, je me permets de vous référer à la page 82. « La conversation au Café des Sports roulait encore et encore sur la question du nouvel arrivé autrement passionnante que les considérations horticoles sur l’essor inquiétant du bio, autrement cabrée, autrement râleuse et renâcleuse et rancuneuse et autour de laquelle tous s’accordaient, à quelques nuances près, s’accordait contre, faut-il le préciser, ce contre-là, contre un intrus, contre un système, contre le ciel, contre la presse, contre le rap, contre le temps, contre la mort, contre les dernières lois votées, contre ceux-là qui les contrariaient, contre, contre, contre ce contre-là incarnant aux yeux de tous les habitués la grandeur de l’âme française. »

Quel sera le sort réservé à ce nouvel arrivant ? Quelles seront les actions posées par ces bavards ? Toutes ces conversations sont-elles inutiles ou seront-elles tues ?

Que dire du bio ou de l’immigration ? Que dire de nos réactions face à un étranger ou face à l’inconnu ? Souvent cynique, Tout homme est une nuit nous interpelle face à nos pensées. Un roman à déguster !

Membre : Pierre, Saint-Jean-sur-Richelieu

Salvayre, Lydie. Tout homme est une nuit, Éditions du Seuil, 2017, 247 pages.

Giraud, Brigitte

Dans son récit de soi, Vivre vite, Brigitte Giraud revient sur l’accident de moto qui a tué son conjoint, Claude, le mardi 22 juin 1999 à 16 h 24 (décès constaté à 21 h 30). La moto : une Honda 900 CBR Fireblade, une bombe sur deux roues, une machine infernale.

Comme une juge d’instruction, elle fait enquête, vingt ans après les faits, interroge les personnes impliquées, de près ou de loin, dans le tragique événement. Elle démonte, pièce par pièce, une implacable mécanique d’événements (« l’engrenage qui allait faire basculer notre existence »).

Son récit, qui rappelle Chronique d’une mort annoncée de Gabriel García Márquez, enchaîne les « si » : « Si je n’avais pas voulu vendre l’appartement », « si je n’avais pas visité cette maison », et encore si ceci, si cela… Vingt-trois chapitres, vingt-trois « si ». Et ces pièces, elle les considère, comme encore saisie d’un sentiment d’irréalité : chacune semble si banale, et pourtant, une fois assemblée aux autres, surgit l’impensable : la mort, l’absence définitive de l’être aimé, une rupture dans la continuité du temps.

Dans son effort de reconstitution, elle va jusqu’à tenter de ressaisir Claude de l’intérieur, imaginer les pensées qui l’ont mené à poser tel geste plutôt que tel autre… On comprend alors que, même après tout ce temps, le deuil n’est pas encore fait, qu’elle n’a pas lâché prise, qu’elle cherche encore à retrouver une présence qui lui échappe justement de plus en plus : le regard de Claude, son sourire, son odeur, sa manière de bouger… Son récit est tout entier dressé contre la fuite du temps, contre l’absence et l’oubli.

Elle cherche aussi à donner un sens à des événements qui, elle le sait bien, n’en ont pas. Il n’y a pas de destin, pas de « machine infernale », pour reprendre le titre de la célèbre pièce de Cocteau. Il n’y a qu’une succession d’événements contingents. Il n’y que la mise en récit du drame, une forme de témoignage, aux accents de mea culpa. Mais ce qu’on comprend aussi, c’est que, par l’écriture, l’autrice, tout en redonnant vie au passé, semble s’en libérer. Quelques indices : elle qui se dit obsédée par le nombre vingt-deux (jour de l’accident), son récit compte… vingt-trois chapitres, numérotés d’ailleurs, et se conclut sur ces phrases que je n’ai d’abord pas comprises : « Je tournais le dos, quelque chose avait eu lieu. J’étais rassurée. »

Ce que j’aime de ce récit, c’est aussi qu’à travers la chaîne causale des « si », ressurgit la dimension sociale des comportements humains. L’insatisfaction permanente, le consumérisme, les rapports de classes, le désir d’ascension sociale (c’est-à-dire, ironiquement, d’échapper à son sort), les effets de mode, l’image (« cool ») qu’on veut projeter de soi, les stéréotypes masculins, féminins, tous ces éléments pèsent sur les actes individuels. S’il y a une machine infernale, elle est là, dans les déterminismes sociaux. S’il y a un procès à instruire, c’est peut-être celui de la société. Et là encore, le temps est à l’œuvre, car les choses se transforment sans cesse, et Giraud le note à plusieurs reprises. Dès la première page : « C’en est fini du silence et de la lumière. La nature qui m’entoure se changera en béton et le paysage disparaîtra. » Il y a avant (l’accident) et après. Et avant, c’était mieux. Qui oserait dire le contraire ?

Membre : S. de Montréal

Giraud, Brigitte. Vivre vite, Éditions Flammarion, 2022, 206 pages.

Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.

Giraud, Brigitte

Ce récit de Brigitte Giraud s’est très rapidement révélé pour moi comme une longue lettre d’amour. Amour pour Claude, son mari, décédé dans un accident de moto le 22 juin 1999.

Elle tente de comprendre, de remonter le temps en explorant une liste de « si ». Si je n’avais pas voulu déménager, si je n’avais pas eu les clés avant la date prévue, si je n’étais pas allée à Paris, ainsi de suite. À travers chaque « si », on fait connaissance avec le couple, on le suit depuis sa rencontre, les appartements, l’enfant, les parents, les amis jusqu’à la journée fatidique d’y il a vingt ans.

Dès les premières lignes, j’ai dégusté l’écriture et le style de Brigitte Giraud et j’ai surtout compati avec elle qui essaie de faire son deuil avec beaucoup de mal.

Pour moi, ce récit très court est un gros coup de cœur et m’a fait passer par beaucoup d’émotions.

Prix Goncourt 2022.

Membre : Floride

Giraud, Brigitte. Vivre vite, Éditions Flammarion, 2022, 206 pages.

Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.

Vingtras, Marie

Des personnages à la limite mystérieux, en ce sens qu’on ne comprend pas pourquoi ils vivent en Alaska, en plein milieu du bois, loin de tout, un bout du monde. Certains y sont nés, d’autres ont choisi d’y vivre, loin de la civilisation.

Lors d’un blizzard, Bess et Thomas sont dehors contre tout sens pratique. Thomas lâche la main de Bess et en quelques secondes, il est introuvable. Commence alors une recherche effrénée pour les retrouver.

Tel un bon polar, s’y dévoilent les traits particuliers de chaque protagoniste, son caractère, son histoire qui évolue au fil du récit. J’ai trouvé ce roman palpitant et l’écriture magnifique et imagée. Beau coup de cœur !

Membre : Floride

Vingtras, Marie. Blizzard, Éditions de l’Olivier, 2021, 182 pages.

Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.

Grimaldi, Virginie

Dans ce nouveau roman de Virginie Grimaldi, on fait la connaissance de trois personnages attachants : Jeanne, Théo et Iris, trois destins abîmés par les épreuves de la vie. Malgré les différences de générations, ils vont apprendre à vivre ensemble.

On retrouve dans ce livre beaucoup d’émotions, des rires, des désillusions, de la bienveillance, de l’amour et de l’espoir.

Un bouquin tonique ! Bonne lecture !

Abonnée : bibliothèque Germaine-Guèvremont

Grimaldi, Virginie. Il nous restera ça, Éditions Fayard, 2022, 388 pages.

Dupont-Monod, Clara

Je propose aux membres du Club des Irrésistibles le roman de Clara Dupont-Monod pour son écriture fine par laquelle elle raconte le bonheur et le poids que peut représenter l’arrivée d’un enfant lourdement handicapé dans une famille.

Prix Femina et prix Goncourt des lycéens 2021.

Membre : Lindy, Montréal

Dupont-Monod, Clara. S’adapter, Éditions Stock, 2021, 170 pages.

Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.

Tuil, Karine

Des attentats terroristes surviennent en France depuis le début du siècle. « À partir de 2015, on a tout judiciarisé : dès qu’il y avait un départ pour la Syrie, on ouvrait une enquête pour association de malfaiteurs en vue d’une entreprise terroriste, on ne triait plus. » (p. 30)

C’est ainsi que la juge d’instruction antiterroriste Alma Revel sera amenée à interroger Abdeljalil Kacem à son retour en France après un séjour en Syrie. Son témoignage ne laisse supposer aucune filiation avec Daech, lui qui se présente comme un homme pacifique. La juge est partagée face à la décision qu’elle doit prendre : le libérer ou l’incarcérer ?

Parallèlement à sa vie professionnelle, Alma Revel est en processus de divorce. Se rendra-t-elle au bout de sa quête de bien-être considérant l’attachement et l’amour qu’elle porte à ses enfants ? Une autre décision cruciale à prendre…

De plus, elle entretient depuis quelques temps une liaison avec l’avocat Emmanuel Forest qui défend Kacem. Un conflit professionnel qui la déchire, consciente que sa réputation sera ternie à jamais si la nouvelle se répand. Douloureuse troisième décision qui l’attend…

Très d’actualité, ce roman fort bien documenté révèle une intrigue passionnante portée par une écriture magnifique. À lire sans faute !

Membre : Colombe, Ville de Québec

Tuil, Karine. La Décision, Éditions Gallimard, 2022, 296 pages.

Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.