Bonjour à vous toutes et à vous tous,
Dans ce 20e livre, Philippe Besson délaisse la veine autobiographique et dédie Le Dernier Enfant (Julliard, 2021) à sa mère. Toujours écrit dans un style simple, sans esbroufe, il se met dans la peau d’une mère de famille française qui voit partir de la maison son petit dernier.
Si le titre du film d’Ettore Scola, Une journée particulière n’avait pas déjà été pris, Besson aurait pu s’en inspirer, car même si l’histoire n’est pas du tout la même, Anne-Marie et Patrick, en tant que parents, vont vivre, eux aussi à leur manière, une journée particulière.
Philippe Besson a le talent de rendre une histoire banale intéressante. À mon avis, il n’y a rien de plus difficile que d’écrire sur le quotidien et encore plus quand celui-ci n’a rien de très excitant, mais l’écrivain évite tous les pièges et réussit à garder notre intérêt jusqu’à la fin.
L’auteur l’a sans doute voulu ainsi, mais il ne donne aucune indication de temps (l’année où se situe l’action), de lieu (seule une rue est nommée, Vincent-Auriol) et les personnages n’ont que des prénoms.
À 50 ans, Anne-Marie habite la maison de ses parents, décédés à la suite d’un accident de la route alors qu’elle avait à peine 20 ans. Pour réussir à en payer les derniers versements, elle avait dû abandonner ses études et s’était trouvé un boulot chez Leclerc, là même où travaillait celui avec qui elle est en couple depuis bientôt trente ans. Alors qu’elle y est aujourd’hui caissière, Patrick, lui, est passé de vendeur dans le département de l’électroménager à chef de rayon.
Peu loquace, le père n’en est pas moins gentil, serviable et pragmatique. La mère est bonne cuisinière et s’occupe méticuleusement de la maison. Ce sont des êtres de routine, d’habitudes. Par exemple, c’est Patrick qui tond le gazon le dimanche matin, alors que les « géraniums c’est elle, les fleurs c’est elle, depuis toujours ». Ils ne vont pas au cinéma, regardent peu la télévision, elle lit des romans le soir pendant que son mari dort à ses côtés.
C’est jour de déménagement. Les parents vont donc donner un coup de main à Théo, leur fils cadet de 19 ans. Il est le dernier de la fratrie à quitter le nid familial ; Julien, l’aîné, a épousé Pauline, alors que Laura, leur sœur, travaille à Madrid depuis quelques années.
En ce dimanche matin, c’est le branle-bas de combat dans la maison. On sent de la fébrilité dans l’air, on tente de garder le contrôle sur ses émotions, de ne pas trop donner de directives à fiston. Le père a emprunté le Kangoo de la compagnie pour transporter les dernières boîtes. Après le petit-déjeuner et les quelques articles, vêtements et autres accessoires chargés, c’est le grand départ. À peine quarante minutes de route pour arriver au studio situé non loin de l’université où Théo a été admis.
Autant le trajet en voiture que les moments passés à l’appartement de 22 mètres carrés à faire du rangement et le repas partagé au resto avant de reprendre la route sont l’occasion d’évoquer les vacances en camping, les quelques sorties familiales au restaurant, l’accident de vélo subit par Théo…
Cette journée a été très éprouvante pour Anne-Marie, mais également pour Patrick, même s’il tente de le camoufler. Une page vient de se tourner pour eux, mais quels en seront les conséquences à court et moyen terme ? Même si on se prépare mentalement à voir sa progéniture partir de la maison, est-on jamais vraiment prêt ? Quand toute la vie d’une femme tourne autour de ses enfants, le jour où ils ne sont plus là, quels sentiments surgissent ?
Anne-Marie a la conviction qu’elle ne servira plus à grand-chose. « Elle avait une occupation, un but. Comment fait-on quand cette occupation disparaît du jour au lendemain ? Avec quoi on remplit la vie ? » (p. 164) La parole peut-elle être alors libératrice ? Téléphoner à ses autres enfants pour obtenir un peu de réconfort ou solliciter sa voisine pour venir prendre le thé peuvent-ils diminuer le chagrin que l’on ressent ou retarder la solitude qui nous attend ?
Dans ce roman d’une grande sensibilité et de respect pour les gens ordinaires, Philippe Besson rend, in fine, un bel hommage à toutes les mamans, nous offrant, par la même occasion, un agréable moment de lecture !
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Je vous souhaite de très belles découvertes et à la semaine prochaine,

Marie-Anne