Je reprends ici quelques mots de la recension de Marie-Anne Poggi en date du 27 décembre 2018.
« Tout y passe : le jeu de la séduction, l’adultère, le mensonge, les cachotteries, la jalousie, les querelles, mais aussi quelques moments de rapprochement, de réconciliation… »
Dans ce volume, il n’y a aucune place pour l’amour dans le couple et pourtant l’amour existe. Cependant, c’est beaucoup de travail au quotidien et cela demande une certaine maturité psychologique.
Contrairement à Marie-Anne Poggi, je n’ai pas parcouru ce livre avec « délectation ».
Abonnée : bibliothèque Germaine-Guèvremont
Bismuth, Nadine. Un lien familial, Éditions du Boréal, 2018, 318 pages.
Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.
Professeure de lycée, la narratrice élève seule sa petite fille depuis que le père l’a brusquement quittée. Un 31 décembre, au cours d’un réveillon, débarque une violoniste prénommée Sarah, à la beauté étrange. Une vraie tornade, toute en exubérance et en excès.
Ça raconte Sarah décrit les tumultes d’une folle passion amoureuse entre deux femmes. C’est l’histoire d’un coup de foudre, d’une passion. Un tourbillon d’émotions, de mots et de fureur, fureur de mourir et fureur de vivre.
Une plume délicate et virevoltante, un vrai bijou, un moment de grâce. Par son style, son écriture et sa sensibilité, l’auteure réussit à nous transporter dans ce que vit la narratrice. Plongez-y, c’est étourdissant.
Membre : France
Delabroy-Allard, Pauline. Ça raconte Sarah, Éditions de Minuit, 2018, 189 pages.
Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.
Ça raconte Sarah (éditions de Minuit, 2018), premier roman de Pauline Delabroy-Allard, est l’histoire prenante et intense d’un amour fiévreux, obsessionnel, dévastateur qui, sur son passage, deviendra une spirale sans fond.
Drôle de coïncidence. Je venais de terminer la lecture du dernier opus de Philippe Besson, Un certain Paul Darrigrand (Julliard, 2018) – dont je vous ai parlé la semaine dernière –, quand j’ai enchaîné avec Ça raconte Sarah. J’ai eu la forte impression, sous certains aspects, que les livres se complétaient : la découverte d’un nouvel amour entre hommes du côté de Philippe Besson et celle d’un premier amour entre deux hétérosexuelles chez Pauline Delabroy-Allard.
La narratrice, jamais nommée, habite dans le XVe arrondissement parisien. Nouvellement professeure dans un lycée, elle est la maman d’une petite fille dont le papa n’est plus dans le décor. Au moment de sa rencontre avec Sarah, elle est en couple avec un Bulgare dont ne sait presque rien. Très vite, il va disparaître du radar.
Sarah, elle, la mi-trentaine, a grandi dans le XVIe arrondissement aux côtés de ses parents et de ses deux frères. Elle habite aujourd’hui la commune des Lilas, rue de La Liberté. Violoniste talentueuse et fougueuse, elle est souvent en tournée avec son quatuor à cordes.
Comment décrire cette femme célibataire ? Exubérante, insatiable, impatiente, qui s’émerveille telle une gamine et vit à la puissance dix comme si son temps était compté. Elle fume, boit, parle vite et fort, déplace beaucoup d’air et, même si elle est épuisante, elle est drôle et vivante.
C’est lors d’un souper chez des amis réunis pour célébrer la fin d’une année – possiblement 2013, mais ce n’est jamais vraiment précisé –, que les deux femmes vont faire plus ample connaissance. Avant de rencontrer Sarah, la narratrice vivait un moment de latence qui, d’après Sarah, se définit comme « le temps qu’il y a entre deux grands moments importants ».
Très vite elles vont se revoir, aller ensemble au concert, au cinéma, au théâtre. Et la narratrice de dire : « Je ne pensais pas toucher un jour le corps d’une femme, aimer ça à la folie au point d’y penser sans arrêt, nuit et jour. Elle ne quitte pas mon esprit. » Et puis, petit à petit, l’une des deux étouffe et demande d’espacer leurs rencontres.
Il est fait mention de plusieurs compositeurs – Beethoven, Bartók, Schubert, Mendelssohn, Brahms – ce qui nous donne le goût de réécouter ces prodiges, tout en nous promenant de Paris à Venise, du château de Chambord en passant par Milan, Trieste et Marseille.
Je ne suis pas certaine d’avoir bien saisi l’enjeu de la deuxième partie. Si vous lisez Ça raconte Sarah, peut-être pourrez-vous me donner une réponse… Mais ce flou autour de l’une des protagonistes est sûrement voulu de la part de l’auteure. Était-ce pour accentuer la dérive d’un amour plus grand que nature, auquel on ne s’attendait pas et duquel on ne se remettra probablement jamais ? Ou alors, est-ce plutôt une métaphore de la rupture, de la blessure amoureuse ? Peut-être.
Le style de l’auteure est alerte, elle a de belles trouvailles – comme insérer des définitions de certains termes ou des explications concernant des lieux. Sans conteste, je vais suivre le parcours littéraire de Pauline Delabroy-Allard qui, par son écriture et son sujet, est venue me bousculer et me troubler. À lire !
Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.
Le lundi 21 janvier, à Radio VM (91,3 FM), de 17 h 45 à 18 h, dans le cadre de Culture à la carte, je m’entretiendrai avec la comédienne Dominique Quesnel, qui nous parlera de la pièce La Queens’ de Jean Marc Dalpé, présentée à La Licorne jusqu’au 23 février 2019.
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Je vous souhaite de très belles découvertes et à la semaine prochaine,
Ce court roman, vivement mené, est situé dans la campagne québécoise. Il baigne dans un réalisme poétique qui me rappelle les premiers romans d’Anne Hébert.
Les personnages principaux sont volontaires, déterminés, originaux, il s’agit d’un jeune musicien qui deviendra, à son corps défendant, forestier et d’une jeune femme qui fuit la violence familiale. Ils se rencontreront et connaîtront un destin particulier.
Christine Eddie excelle dans la description de la nature et des interactions sociales ; les êtres qu’elle crée ont une qualité d’âme remarquable. En filigrane de l’histoire, se tisse la destruction d’un Québec rural où la forêt doit céder la place aux centres commerciaux.
Membre : LaSalle
Eddie, Christine. Les Carnets de Douglas, Éditions Alto, 2007, 198 pages.
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En 2017, Philippe Besson nous offrait le magnifique « Arrête avec tes mensonges », à la mémoire de Thomas Andrieu (1966-2016), le grand amour de ses 17 ans. Deux ans plus tard, dans Un certain Paul Darrigrand (Julliard, 2019), l’auteur relate la relation amoureuse et tumultueuse de ses 21 ans avec un jeune homme de trois ans son aîné.
Le roman commence avec ces mots : « La photo, je ne la cherchais pas. Je suis tombé dessus par hasard, parce que je m’apprêtais à déménager et que j’avais entrepris de me débarrasser de ces choses qu’on entasse dans des armoires […]. Pour être parfaitement honnête, j’en avais presque oublié l’existence. Vous savez : le temps qui passe, la mémoire qui fait ses choix. »
La photo dont il est question ici a été prise sur l’île de Ré en 1988, à quelques jours de Noël. On y voit, entre autres, Paul (celui du titre) et le narrateur-auteur dont le nom n’est jamais prononcé.
Le narrateur prend parfois à partie le lecteur et l’invite à regarder dans le rétroviseur… Mais pour bien comprendre l’importance qu’a eue Paul dans sa vie, il remonte le fil du temps, plusieurs mois avant la prise du cliché.
Normandie, juin de la même année. Le narrateur vient de terminer ses études à Rouen, où il a obtenu son diplôme d’école de commerce pour faire plaisir à son père qui habite Barbezieux, en Charente. Solitaire et malheureux, il fait ses valises en direction de Bordeaux où il loue une chambre rue Judaïque, car il entame, en septembre, sa dernière année universitaire.
Paul Darrigrand étudie au même endroit que le narrateur, mais suit un autre cursus. À la cafétéria, il se présente : Paul Darrigrand. Fils unique, né à Hossegor dans les Landes, il est marié depuis quatre ans à Isabelle, infirmière à Bordeaux dans une unité psychiatrique. Malgré cette situation, Paul et le narrateur vont tranquillement se rapprocher, s’apprivoiser, s’aimer follement ; mais rien n’est simple, encore moins quand la maladie frappe…
Que de questionnements soulevés dans ce roman ! Et que dire des doutes, de l’attente, du plaisir des retrouvailles, des corps qui se cherchent et se trouvent, les moments d’euphorie puis de déception et de tristesse.
Philippe Besson nous offre un très beau texte sur l’amour et ses conséquences avec, en prime, un nouvel éclairage sur certains de ses romans : En l’absence des hommes (2001), Son frère (2001) et Un garçon d’Italie (2003).
Troisième et dernière partie de l’entretien réalisé à la bibliothèque Robert-Bourassa dans le cadre de son 20e anniversaire.
Aujourd’hui, le cinéaste et écrivain québécois Jacques Godbout nous dévoile ses cinq coups de cœur littéraires. Bonne écoute !
Réalisation : Stéphane Richard.
Entrevue menée par Marie-Anne Poggi.
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Je vous souhaite de très belles découvertes et à la semaine prochaine,
Un autre beau livre vivement recommandé. Une très belle écriture et une façon intelligente de présenter deux personnages, d’abord enfants, ensuite adultes modelés par leur milieu et leurs expériences personnelles.
Babelio : « Il vient du bout du monde, il n’a pas de diplôme, pas d’argent, pas d’attaches. Elle est le fruit d’une éducation d’un autre âge, elle a une famille parfaite, un métier exigeant, un carcan de certitudes. Il s’oublie dans le corps des femmes. Elle se fuit dans les mots. Depuis l’enfance, ils se cherchent. Ils s’accrochent l’un à l’autre. Ensemble ils tombent au fond du puits. »
Membre : Westmount
Castro, Eve de. Cet homme-là, Éditions Robert Laffont, 2010, 325 pages.
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J’ai beaucoup aimé ce livre. Les personnages hors de l’ordinaire sont très touchants, on aurait envie de les protéger.
À la suite d’événements dramatiques, Mattia Balossino se réfugiera dans les sciences et Alice Della Rocca, de son côté, s’infligera des souffrances que lui seul peut (peut-être) comprendre. Comme les nombres premiers, même s’ils s’éloignent parfois l’un de l’autre, ils ne peuvent être divisés… que par eux-mêmes.
L’histoire est intrigante, l’écriture fluide : un très beau moment de lecture.
Titre original : La Solitudine dei numeri primi
Membre : Verdun
Giordano, Paolo. La Solitude des nombres premiers, Éditions du Seuil, 2008, 2009, 329 pages.
Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.
L’amour au rythme de nos vies actuelles. Fidélité, infidélités, passions éphémères et la vie familiale à travers ce kaléidoscope, tout un défi.
Magalie est designer de cuisines. Elle vit avec Mathieu, avocat. Il l’a trompe, mais elle ne dit rien et en souffre. À son tour, elle se venge et le trompe : où cela les mènera-t-il ? Quand elle rencontre Guillaume, lors d’un dîner familial chez sa mère, des rapprochements se font.
Chronique sociale des relations nouées par des êtres bousculés par les vies trépidantes que nous menons. Intéressant !
Membre : Laval-Vimont
Bismuth, Nadine. Un lien familial, Éditions du Boréal, 2018, 318 pages.
Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.
J’ai pris grand plaisir à lire Un lien familial (Boréal, 2018) de Nadine Bismuth.
L’histoire débute un 29 août quand Charlotte, la fille de Magalie et de Mathieu, entre à la maternelle et se termine le samedi 4 mars de l’année suivante, alors que quelques couples vont se séparer et découvrir des choses pas toujours reluisantes et glorieuses les uns sur les autres.
Les neuf chapitres portent les prénoms de deux des protagonistes qui prennent la parole à tour de rôle.
D’un côté, on suit le parcours de Magalie Breton, une femme de 40 ans, fille unique, en couple depuis bientôt sept ans avec Mathieu, avocat au cabinet Blitt Cantin Ségur, dont les bureaux sont situés au centre-ville de Montréal.
Magalie, qui vient d’un milieu modeste, gagne bien sa vie chez Penture, entreprise montréalaise située en face du parc Jarry, boulevard Saint-Laurent. Depuis quatre ans, elle y travaille comme designer de cuisines haut de gamme. La petite famille habite le condo de Mathieu, rue Saint-Vallier à Rosemont.
De l’autre côté, Guillaume Hamelin, 45 ans, policier depuis bientôt 20 ans. Divorcé depuis sept ans, il a la garde partagée de sa fille de 12 ans, Julianne. Même si son lieu de travail est dans le quartier du Plateau, il habite toujours un bungalow à Sainte-Julie.
Tout va relativement bien dans la vie de Guillaume et de Magalie qui ne se connaissent pas encore. Jusqu’au jour où cette dernière apprend que sa mère, Monique Brouvrette Breton, veuve depuis sept ans, « a rencontré André Hamelin sur un site de rencontre pour retraités », ingénieur à la retraite du CN… Eh oui, le père de Guillaume !
Tout ce beau monde va faire connaissance dans des circonstances que je vous laisse découvrir. Bien sûr, tout ne se déroulera pas comme l’auraient souhaité plusieurs d’entre eux. L’un est follement amoureux d’une femme qui est déjà en couple ; un autre trompe sa femme qui va apprendre les infidélités de son mari ; un troisième a caché à sa nouvelle flamme qu’il a eu une aventure avec la fille de son ancienne conjointe. Mais ce n’est pas plus réjouissant pour la gent féminine qui aussi batifole en dehors des liens du mariage…
Aujourd’hui dans la quarantaine, Nadine Bismuth a eu le temps d’observer les aléas du couple, de la famille et ce qui il y a de meilleur et de pire chez l’être humain. Tout y passe : le jeu de séduction, l’adultère, le mensonge, les cachotteries, la jalousie, les querelles, mais aussi quelques moments de rapprochement, de réconciliation…
Ce roman a dû demander de nombreuses heures de recherches à l’auteure, très précise dans les plus petits détails, tous vérifiables, j’en ai fait l’expérience à quelques occasions. La plume de Nadine Bismuth est toujours aussi incisive, elle a le sens du dialogue et de la répartie.
On tourne les pages d’Un lien familial avec délectation. Une très belle réussite !
Ma chronique théâtrale et muséale pour l’émission Culture à la carte à radio Ville-Marie fait relâche durant la période des Fêtes. Je vous propose, durant les trois prochaines semaines, l’entretien que nous a accordé, un peu plus tôt cette année, dans le cadre du 20e anniversaire de la bibliothèque Robert-Bourassa, l’écrivain et cinéaste québécois Jacques Godbout, au moment de la publication de son autobiographie De l’avantage d’être né (Boréal, 2018).
Partie 1 de 3. Jacques Godbout : regard dans le rétroviseur.
Bonne écoute ! Suite la semaine prochaine.
Réalisation : Stéphane Richard.
Entrevue menée par Marie-Anne Poggi.
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Je vous souhaite de très belles découvertes et à la semaine prochaine,
Ce premier contact avec l’œuvre de Luca Di Fulvio s’est avéré une agréable découverte.
L’auteur nous amène dans la ville marécageuse de Venise à son apogée en 1516 et nous embarque littéralement dans une histoire d’amour digne de Roméo et Juliette. Comme le dirait Fugain : c’est un beau roman, c’est une belle histoire… où se côtoient bravoure, trahison, amitiés, courage, détermination et résilience.
Cette brique de 798 pages, admirablement bien ficelée, vous tient en haleine du début à la fin. C’est l’affrontement du bien et du mal, du mensonge et de la vérité, de la richesse et de la pauvreté. Le descriptif de Luca Di Fulvio n’a d’égal que celui d’Émile Zola.
À lire par ceux qui veulent retrouver le sens de l’aventure épique.
Titre original : La ragazza che toccava il cielo
Membre : Pointe-Claire
Di Fulvio, Luca. Les Enfants de Venise, Éditions Slatkine & Cie, 2013, 2017, 798 pages.
Nous sommes au début du XXe siècle. Un orphelinat de Montréal, toutes les filles s’appellent Marie et les garçons Joseph. Parmi la grisaille des enfants abandonnés brillent deux étoiles : Rose et Pierrot.
Les deux orphelins se produisent en spectacle devant de riches Montréalais pendant les Années folles. Il joue du piano, elle danse et ils rêvent ensemble de fonder le plus grand cirque du monde. Arrivent la Crise, les obstacles, la pauvreté et l’univers interlope.
Heather O’Neill a une imagination unique, c’est souvent violent, mais l’amour a raison de toutes les tempêtes. À lire absolument !
Peu de livres m’ont autant emballée que celui-ci. Je l’avoue sans pudeur, j’ai retrouvé à sa lecture mes émois de jeune lectrice devant la beauté d’un texte sachant exprimer autant d’émotion.
Ça raconte Sarah est la description d’une passion amoureuse entre Sarah, la virtuose, et la narratrice, mère monoparentale et professeure de lycée. Deux femmes que rien ne prédestinait à vivre cette relation avec autant d’abandon.
Passion dévorante qui se terminera (peut-être) par la mort de l’une, qui rompra afin que l’autre ne la voit pas souffrir, et par l’abandon total de soi de l’autre, qui ne se pardonne pas d’avoir (peut-être) tué l’une afin de l’empêcher de souffrir.
L’écriture lyrique, fiévreuse, hachée, emportée, incontrôlée parfois, supporte magnifiquement le trop plein d’émotion qui rend quasiment dysfonctionnelle la narratrice. Ce besoin de l’autre la dévore physiquement et intellectuellement et elle n’est pas outillée pour y faire face.
C’est beau, sensuel, passionné, violent et ardent !
Membre : Christine, Outremont
Delabroy-Allard, Pauline. Ça raconte Sarah, Éditions de Minuit, 2018, 189 pages.
Un poignard dans un mouchoir de soie (éditions du Boréal, 2018), le dernier roman de Robert Lalonde, m’a laissée un peu sur ma faim. Si je vous en parle malgré tout, c’est que j’aime autant l’auteur que le comédien.
Divisé en trois actes, comme vous le voyez le théâtre n’est jamais loin, ce roman met en scène trois individus qui, malgré le fait qu’ils soient très différents, seront un réconfort les uns pour les autres.
Que représente au juste Jérémie Guidé dans la vie d’Irène, comédienne de 76 ans, et de Romain, 81 ans, professeur de philosophie à la retraite après 39 ans de service dans l’enseignement ?
Début avril, alors que Romain assistait aux funérailles de l’un de ses amis, il fait connaissance avec Jérémie sur le parvis de l’église. Quelques semaines plus tard, c’est au tour d’Irène, qui a un rôle de soutien dans une pièce, de le rencontrer à l’arrière d’un théâtre montréalais où elle était sortie fumer une cigarette. Mais comment et dans quelles circonstances Romain et Irène se sont-ils rapprochés ? Je n’en dis pas plus…
Ce que je peux préciser, par contre, c’est que depuis qu’ils ont croisé le chemin de Jérémie leur vie a changé. Ils se sont très vite attachés à ce jeune trentenaire qui porte barbe et capuche en permanence, fugue sans avertir et sans préciser le pourquoi de son absence. Il intrigue par son comportement, mais pas seulement. Son langage est parfois coloré, mais il est aussi très habile avec ses réparties pleines d’esprit. Et malgré le fait qu’il se prostitue, boit et se drogue, c’est un être charmant que l’on ne peut juger et avec qui on a envie de passer du temps. Que cache cet être énigmatique ?
Avec Robert Lalonde, la littérature n’est jamais loin, elle non plus ; il cite entre autres Marguerite Duras et Gustave Flaubert. Au final, j’ai trouvé l’intrigue un peu mince et les dialogues souvent ordinaires. On a déjà connu l’écrivain en plus grande forme…
Le lundi 12 novembre, à Radio VM (91,3 FM), de 17 h 45 à 18 h, dans le cadre de Culture à la carte, je m’entretiendrai avec Mark Lanctôt, conservateur au Musée d’art contemporain de Montréal et commissaire de l’exposition Françoise Sullivan, présentée jusqu’au 20 janvier 2019.
Lundi dernier, je recevais Anne Grace, conservatrice de l’art moderne au Musée des-beaux arts de Montréal et co-commissaire de l’exposition Alexander Calder : un inventeur radical, présentée jusqu’au 24 février 2019, expo qui partira vers Melbourne du 5 avril au 4 août 2019 à la National Gallery of Victoria.
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Je vous souhaite de très belles découvertes et à la semaine prochaine,
Dans ce nouveau roman, l’auteure nous entraîne dans une histoire émouvante et simple à la fois où le destin de deux êtres va se croiser.
Anaëlle, jeune femme célibataire, tente de se reconstruire après avoir été victime d’un accident de voiture qui lui a laissé de graves séquelles.
Elle est secrétaire médicale et parallèlement, elle écrit un roman. Pour avoir des informations complémentaires à sa rédaction, elle va contacter son ancien professeur devenu procureur de la République. Il est marié, a deux adolescents et sa vie est assez routinière. Commence alors entre eux un échange épistolaire assez ambigu et cela pendant plusieurs mois. Sur quoi débouchera cet échange ?
Thomas est menuisier, passionné par les arbres et la nature. Passion qu’il partage avec son petit frère qui est hospitalisé pour une grave maladie. Il lui rend visite tous les jours pour égayer ses longues journées et lui parler de la forêt, des arbres, des feuilles, des papillons, des projets qu’ils ont pour l’avenir. C’est en faisant des travaux dans la maison qu’Anaëlle vient d’acheter qu’ils feront connaissance.
Ce livre est bouleversant et rempli de poésie aussi. Il y a longtemps que je n’avais pas eu un coup de cœur pour un livre. À lire sans modération !
Membre : France, Romans-sur-Isère
Ledig, Agnès. Dans le murmure des feuilles qui dansent, Éditions Albin Michel, 2018, 389 pages.
Le 16e roman de l’écrivaine d’origine franco-algérienne Nina Bouraoui, Tous les hommes désirent naturellement savoir (JC Lattès, 2018), débute par ces mots : « Je me demande parmi la foule qui vient de tomber amoureux, qui vient de se faire quitter, qui est parti sans un mot, qui est heureux, malheureux, qui a peur ou avance confiant, qui attend un avenir plus clair. »
Comme vous l’aurez compris, il est ici question d’amour, à commencer par celui d’une fille, pas comme les autres, pour sa mère, mais également d’un attachement très profond à l’Algérie où Nina Bouraoui a eu une enfance heureuse et à la France qui lui a permis de vivre son premier amour féminin.
Avec Tous les hommes désirent naturellement savoir, l’écrivaine ajoute une pierre de plus à la construction de la maison qu’elle bâtit depuis bientôt deux décennies. Composé de brefs chapitres, ces instantanés photographiques alternent, en majorité, entre Rennes, Alger et Paris.
Nina et sa sœur, son aînée de cinq ans, sont le fruit de deux cultures. Leur mère est française et leur père, algérien musulman, est venu faire ses études à la faculté de droit et d’économie de Rennes. C’est à la mairie de cette commune qu’ils se sont mariés avant d’aller vivre à Alger. « Ma mère est arrivée en Algérie quand les Français, les colons, quittaient le pays. »
Aujourd’hui âgée de 51 ans, Nina Bouraoui, qui ne parle pas arabe et ne croit pas en Dieu, évoque ses 14 années passées en Algérie, avant de revenir en France le 17 juillet 1981.
À 18 ans, alors qu’elle fait son bac, Nina fréquente à raison de trois à quatre soirs par semaine le Katmandou, plus communément appelé le Kat, club lesbien situé dans le 6e arrondissement parisien, rue du Vieux-Colombier. À cet âge-là, Nina n’assume pas encore son attirance pour les femmes. Elle devient paranoïaque, craignant que l’on découvre son homosexualité et par le fait même, doit parfois mentir. Elle se sent honteuse, coupable et est effrayée par le sida, etc.
Les mots peuvent beaucoup, mais pas tout, même si elle dit : « J’écris pour être aimée et pour aimer à l’intérieur de mes pages. Je réalise mes rêves en les écrivant – je m’invente, ainsi, de nombreuses liaisons, vainquant ma peur des femmes et de l’inconnu. » (p. 115-116)
Nina Bouraoui franchira les étapes progressivement, « […] je dois quitter mon enfance pour exister », surmontera ses peurs – elles sont nombreuses –, se tiendra au Kat avec la « bande d’Ely » où elle dansera son premier slow avec Julia, une Colombienne de presque 30 ans qui l’attire, mais vers laquelle elle n’est pas capable « d’aller plus loin » que de l’embrasser.
Les titres de chapitres, « Devenir », « Se souvenir », « Savoir » et « Être » s’entrelacent, se répondent, se complètent, nous permettant de suivre la jeune fille en devenir qui se souvient de son enfance en Algérie, de ses amis, surtout d’Ali, qui veut connaître ses origines familiales, avant de pouvoir être celle qui deviendra l’écrivaine et l’amoureuse.
Bien écrit, ce témoignage sincère et touchant sera, je l’espère, une source d’inspiration pour les femmes et les hommes de tous âges qui ont de la difficulté à s’affirmer, à accepter leur identité sexuelle.
Le lundi 5 novembre, à Radio VM (91,3 FM), de 17 h 45 à 18 h, dans le cadre de Culture à la carte, je m’entretiendrai avec Anne Grace, conservatrice de l’art moderne au Musée des beaux-arts de Montréal et co-commissaire de l’exposition Alexander Calder : un inventeur radical, présentée jusqu’au 24 février 2019, expo qui partira vers Melbourne du 5 avril au 4 août 2019 à la National Gallery of Victoria.
Lundi dernier, je recevais le metteur en scène Vincent-Guillaume Otis, venu nous parler de la pièce Des souris et des hommes de John Steinbeck, présentée chez Duceppe jusqu’au 1er décembre 2018.
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Tout le monde a encensé ce roman. Il est vrai qu’il est fort bien écrit même dans sa traduction (sauf quand il dit, je cite de mémoire : « […] il était couché à côté d’elle, dans la même position, la cheville du pied gauche appuyée sur son talon droit… » Essayez ça pour voir, vous m’en donnerez des nouvelles).
C’est une écriture moderne, vive, qui met en scène de jeunes personnages qui vivent des tourments liés à la solitude qui ne sont pas inintéressants, au contraire. Mais…
Mais quelle froideur de style, d’écriture, de sentiments. Les mathématiques, l’algèbre, les nombres, les théorèmes prennent une place tellement importante dans la tête de Mattia qu’on n’est pas étonné que tout foire autour de lui.
Titre original : La Solitudine dei numeri primi
Membre : Rosemont
Giordano, Paolo. La Solitude des nombres premiers, Éditions du Seuil, 2008, 2009, 329 pages.
Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.
J’ai beaucoup aimé ce roman de Philippe Besson. C’est la beauté et la fragilité de l’amitié ayant pour toile de fond l’Amérique des années 50 et 60.
L’histoire est racontée par Thomas qui, tout au long du livre, tente de justifier sa trahison.
J’ai également écouté sur Web TV Culture un entretien avec Philippe Besson durant lequel il explique sa démarche d’écriture. Vraiment très intéressant !
Membre : Île-des-Sœurs
Besson, Philippe. La Trahison de Thomas Spencer, Éditions Julliard, 2009, 265 pages.
Cette oeuvre a déjà été suggérée par le Club des Irrésistibles, lire ici.
Comme mentionné par un membre du Club des Irrésistibles dans la chronique du 6 septembre dernier, ce livre est touchant et nous montre par les réflexions de trois personnages, une facette des tragédies qui se jouent pour certains immigrés.
Bien écrit, il nous met dans un contexte très actuel. On y parle de réfugiés, de sans-papiers, de morts en mer et des séquelles pour les survivants, à la suite de ces naufrages en Méditerranée.
Quand on quitte son pays, on y laisse une partie de soi. Un petit livre qui mérite qu’on s’y arrête.
Ce titre fait référence à une peinture de Fra Angelico intitulée Noli me tangere représentant Marie-Madeleine rencontrant le Christ ressuscité. La position des mains de Jésus et de Marie-Madeleine suggère qu’elle tente de le toucher et qu’il l’en empêche en lui disant : « Ne me touche pas », paroles interprétées par certains exégètes comme voulant dire : « Je ne peux plus te donner mes mains qui t’ont tant aimée. »
À partir de cette anecdote, Camilleri réussit encore une fois le tour de force de nous raconter une histoire d’amour originale, très italienne, très sicilienne qui nous envoûte et nous déroute du début à la fin. Et laissez-moi vous dire qu’il n’y a pas de longueurs : tout se déroule entre le 5 juin et le 5 juillet 2010… moins de 150 pages de dialogues, d’articles de journaux, de lettres échangées entre les personnages. Une enquête policière (!) vite faite et bien faite. Du bonbon… acidulé.
Titre original : Noli me tangere
Membre : Saint-Jean-sur-Richelieu
Camilleri, Andrea. Ne me touche pas, Éditions Métailié, 2016, 2018, 144 pages.
Livre déconcertant s’il en est. Il s’agit de deux histoires s’imbriquant l’une dans l’autre, l’une se passant au Moyen Âge, l’autre au XXIe siècle.
La première pourrait rappeler celle de Tristan et Iseut : deux amants, un braconnier et une cueilleuse de baies, éperdument amoureux, vivent leur amour en dehors des lois. Les habitants du village s’inquiètent et les espionnent craignant que cette vie dans le péché ne retombe sur eux. Pour les faire taire, les amoureux décident de se marier, indifférents au monde qui les entoure. La jalousie distille son poison dans la population.
Le roi, Louis le vertueux, s’en mêle avec l’espoir d’être guéri par ce couple. Ils sont donc condamnés à être décapités et se retrouvent au Paradis qui finit par les renvoyer sur Terre dans des régions tout à fait opposées… mais les amoureux n’auront de cesse de se retrouver. Partout où ils arrivent, ils émerveillent par leur foi en leurs retrouvailles.
Sur cette histoire particulièrement romanesque se greffe une autre, contemporaine, d’un couple français voulant être le prolongement de l’amour du braconnier et de la cueilleuse.
La lectrice que je suis s’est alors complètement perdue, ne comprenant pas la logique du récit qui est censé montrer comment naissent et se propagent les légendes. La réalité est bien souvent éloignée du romanesque.